8 novembre 2014 6 08 /11 /novembre /2014 16:56

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Le 8 novembre 1924 naissait une certaine Marcelle Golfier.

 

Que savons-nous de cette personne ?

 

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Son père, Pierre, tenait un salon de coiffure à Orléans, au 41 rue de la Bretonnerie. Sa mère, Marie-Louise, était mère de famille, et avait perdu son fils âgé d'un an, le frère de Marcelle, à cause d'un vaccin.

 

Pendant la guerre, Marcelle qui avait une quinzaine d'années, a vécu les bombardements. Il y avait la sirène qui annonçait l'arrivée des avions, et la cave dans laquelle les habitants de l'immeuble s'abritaient. Elle se mettait toujours à côté de son père, car elle savait qu'il avait de la chance dans la vie. Elle avait très peur de mourir pendant les bombardements.

 

Elle racontait volontiers la chance de son père. Pendant la guerre de 14-18, il a passé du temps au front, et n'a jamais eu la moindre égratignure. Un jour, un de ses amis soldtas lui dit : "Ah Golfier, toi tu as de la chance, je me mets près de toi". Une bombe est alors tombée, et un éclat a tué le soldat, et Pierre n'a rien eu.

 

Pendant l'exode en juin 1940, elle est partie sur les routes comme des millions de français. Son petit chien Boby s'était perdu à cette occasion, et elle en était très triste. De retour à Orléans après les quelques semaines d'exode, Boby les attendait devant l'immeuble, il avait parcouru 200 kilomètres et retrouvé son chemin.

 

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Marcelle était assez timide, et très jolie. Elle rencontra un jour un certain Claude, dont le côté blagueur et sportif lui plut tut de suite. Ils se marièrent jeunes, une vingtaine d'années chacun.

 

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Claude racontait également volontiers les "surprise party" qu'ils organisaient. Faisant des études en électricité, il avait électrifié des bonbons placés dans un saladier. Et se tordait de rire à voir les convives se prendre des coups de jus.

 

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Tous deux partaient en vacances avec leur bande de copains, le plus souvent en camping. En Grèce, en Italie, sur le Bassin d'Arcachon...

 

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Marcelle a mis du temps avant de pouvoir avoir des enfants, et elle enrageait de voir ses amies enceintes. Elle enchainait les fausses couches, avec des épisodes hémorragiques parfois périlleux, à la maison. Un beau jour, un chirurgien ami de la famille diagnsotiqua des kystes sur les ovaires. Et dans la foulée les lui enleva, ainsi que l'appendice pour le même prix.

 

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Bingo, Marcelle attendit son premier enfant. Henri, un beau petit gars brun. Puis Michèle, une blonde aux yeux bleus. Enfin Claude, la petite dernière, châtain aux yeux verts. La marraine de Claude en se penchant sur son berceau aurait dit "Ah mais ça va être une petite Didi". Légende familiale ou réalité, je ne sais.

 

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Mais ce surnom m'est resté jusqu'à maintenant. Marcelle est ma mère, elle a 90 ans aujourd'hui.

 

Je suis un peu triste, car je ne peux pas lui souhaiter son anniversaire. Elle vit loin de moi, et n'a pas le téléphone. Ne comprendrait pas ce que je lui dirais au téléphone. Lorsque je lui rends visite, elle est toujours heureuse de me voir. Elle ne me connaît plus, mais sait ce que je représente. Nos liens tissés pendant 55 ans nous permettent de conserver un dialogue par delà les mots.

 

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Ma mère m'a appris le bonheur. A profiter de tous les "petits" riens de la vie. Ecouter le jeu des 1000 francs le midi en rentrant de l'école. Manger un yaourth velouté citron au dessert parce que c'est si bon. Me donner sa main dans la voiture quand on rentrait de la campagne. Me trouver toujours formidable. M'expliquer quand j'avais 7-8 ans que non, elle n'avait pas fait l'amour que 3 fois (je pensais qu'on faisait l'amour juste pour faire des enfants). Nous montrer comment on fait la roue et le grand écart. Me laisser faire des boules de boue, et patauger dans la mare au fond du jardin. S'extasier quand je lui rapportais un gros bouquet de pâquerettes. Ne rien me dire lorsqu'elle avait trouvé un test de grossesse planqué dans ma chambre. Me demander si moi j'allais bien, quand je lui avais annoncé que je quittais mon mari. Me dire il y a peu de temps à la maison de retraite "C'est formidable ces arbres et cette musique".

 

Et dès qu'on avait un moment, elle me disait "On se fait un petit café ?".

 

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Je ressens au fond de moi que ce sera son dernier anniversaire. Par ce petit texte, je lui dis tout mon amour, et je veux croire que le message lui parviendra. 

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