José Luis Borges :
"La nuit nous dicte sa tâche magique.
Détisser les mailles de l'univers,
les ramifications inépuisables
des effets et des causes,
qui se perdent
dans ce vertige insondable - le temps
la nuit exige que cette nuit même,
tu oublies ton nom, ton sang, tes ancêtres,
chaque parole humaine et chaque larme,
ce que la veille a pu te révéler,
le point illusoire des géomètres,
la ligne, le cube, la pyramide,
et plan, sphère, cylindre et vagues,
ta joue sur l'oreiller et la fraîcheur
du drap neuf
les empires, et César et Shakespeare
et, plus difficile, ce que tu aimes".
Un peu moins poétique, Sigmund Freud (le bougre n'avait pas l'air de rigoler tous les jours) :
"Chaque nuit, les êtres humains déshabillent leur esprit et mettent de côté la plupart de leurs acquisitions psychiques. Et ainsi, ils se rapprochent de très près de la situation dans laquelle ils étaient quand ils ont commencé à vivre".
Jean-Claude Ameisen :
"Il suffit d'envisager que l'effet majeur du sommeil est de nous permettre de faire un tri, de faire émerger en nous une mélodie, la mélodie de nos souvenirs durables, qui persistent en nous, à partir de ce bruit quotidien, de ce brouhaha des innombrables événements que nous vivons chaque jour, à partir de ce tumulte qui disparaîtra dans la nuit".
"Cet étrange voyage qui nous ramène jour après jour, aux rivages que nous avons quittés, plus riches de ce que nous avons acquis et plus libres de ce que nous avons perdu".